Vava et ses histoires

Des histoires sur l'amour et la vie, que je pourrais te raconter autour d'une bière.

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Par Lauréna Valette
18 sept. · 4 mn à lire
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La gratitude de l’instant présent

ou mes pensées du lundi matin, au café, après un joli week-end.

À lire avec un café bien chaud entre les mains et de la musique un peu douce dans les oreilles.

Je sors des toilettes, mon verre à la main, et je m'arrête un instant. Je regarde la scène de loin. Les gens parlent, rient, les verres en plastique trinquent. Dans mon salon, il y a des sourires, des accolades, la joie explose au rythme de la musique. La scène est belle

Dans l’herbe, elles sont assises côte à côte. Quiconque les apercevrait, se dirait qu’il y a là un lien d’une vie, infaillible, qui a traversé les époques, les années, les continents. Elles se confient leurs secrets, leurs pensées, elles savent que quoi qu’il arrive dans cette vie ou dans celle d’après, elles seront toujours une oreille à laquelle se confier, des bras dans lesquels se rassurer. Elles sont belles

Elle a débarqué dans ma chambre à 14h le moral dans les chaussettes. On s’est séparées en fin de journée, après avoir regardé le soleil se coucher et pris le temps de s’écouter. 

22h40 un dimanche soir, je rentre dans sa chambre, je m’assois au bord de son lit, elle me raconte les dernières 24h. Trois mois à vivre ensemble, à se voir du matin au soir, chaque détail de nos existences compte et se raconte. Après avoir débriefé la dernière journée, on se dit bonne nuit, avant de se retrouver le lendemain matin. 

Dimanche, 13h, je fais cuire mes œufs. Il fait soleil dehors, la porte de la cuisine est ouverte. Une mélodie pénètre dans la pièce. Une guitare acoustique et un sentiment de douceur qui m’enveloppe immédiatement. On sort, on grimpe sur une chaise, pour regarder lequel de nos voisins s’est lancé dans un concert improvisé. À la fin de la chanson, j’applaudis. La musique s’écoute avec attention et les musiciens se félicitent. Merci pour cette plaisante parenthèse en ce dimanche de septembre, où le ciel a décidé de nous offrir sa plus belle journée, pour profiter une dernière fois des saveurs de l’été

Vendredi, après un énième verre, on s'engage dans une discussion enflammée. Que pouvait-on se narrer encore ? Une vidéo visionnait le lendemain matin nous fait rire, on était très proche, mais on était juste en train de se confier, de se rassurer, de se soutenir. Parce qu’on est une famille ici

Et puis on a aussi chanté I Want it That Way au karaoké, pédalé à travers Montréal, mangé une glace en causant, dansé sur Hannah Montana. J’ai entendu le son du clocher dimanche matin et ça me transporte toujours autant dans une vague de nostalgie. Le clocher est toujours, dans la maison d’enfance, dans la maison de famille, dans l’appartement parisien, le clocher a toujours retenti. Il est l’indicateur d’un beau dimanche, d’une journée aux fortes potentialités. Un tintement rassurant, familier. Un clin d’œil de la vie et un vent de gratitude. 

Quel week-end. Un de plus. Elle a dit “c’était encore un week-end rempli d’émotions, qui est passé si vite !”. Encore un qui te donne envie d’arrêter le temps. Comment est-ce que cela peut défiler aussi vite, alors qu’on a si peu dormi ? Se coucher le dimanche soir avec le sourire aux lèvres, celui qui dit : j’ai vécu quelque chose de beau, je suis heureuse. 

Il est étrange ce mot, “gratitude”. Il me dérange un peu, j’ai constamment l’impression qu'on va l’associer à une miracle morning, un réveil à 5h du matin, du kombucha et un journal dans lequel noter les beaux moments de la journée (j’ai tenu deux mois à faire ça, et un soir sur deux, je me dis que c’est dommage d’avoir arrêté, pourtant je ne recommence pas). 

Cependant, quel autre mot pourrait décrire ce sentiment. Ce n’est pas la mélancolie d'un beau moment terminé trop vite. Ce n’est pas encore de la nostalgie, tout est trop frais pour cela. Simplement de la reconnaissance. La reconnaissance d’avoir vécu ces instants

Comme quand tu pars d’un week-end, que dans le train, tu regardes par la fenêtre en voyant le paysage défilé. Ta musique préférée dans les oreilles, le soleil qui se couche au loin et un sourire sur ton visage. Le cœur gros, les yeux un peu humides d’avoir dit au revoir, mais la joie d’avoir vécu

Le bonheur de ce moment passé, qui t’a empli d’une force nouvelle, d’une énergie communicative. La gratitude d’avoir passé ces quelques heures à plusieurs, d’avoir partagé nos peines, nos craintes, nos peurs. D’avoir écouté les silences, ri très fort et ressenti beaucoup. 

J'ai toujours peur de voir les souvenirs s’effacer, ces sentiments s’envoler, remplacés par d’autres jolis moments, par d’autres émotions. Ne pas les avoir savourés à fond, y repenser un jour en se disant “ce n’était pas assez”, “j’en veux encore”

Je bois mon café, je regarde les autres taper sur leur clavier. Eux aussi, ils ont une todo list à terminer - ou commencer - en ce lundi matin. Un couple de personnes âgées mange un croissant et boit un cappuccino. Ils sont beaux tous les deux. Installés au centre de ce café, la vie a marqué leurs visages. Quel âge ont-ils ? Qu’ont-ils fait de leur week-end ? Ont-ils dansé dans le salon, ont-ils dit à leur meilleure amie qu’ils étaient heureux qu’elle soit là, à leur côté, que la vie était plus douce quand elle était là ? Ont-ils chanté dans un micro ? Gagné leur partie de beer pong ? D’ailleurs, ont-ils déjà joué au beer pong un jour ? Ils ont peut-être passé le week-end à deux, assis au soleil, se racontant les bons souvenirs de la vie d’avant, celle de la jeunesse, celle durant laquelle le corps n’était pas fatigué par les montagnes russes, les nuits trop courtes, les amours fougueux, les amitiés qui transportent, les histoires à se raconter. Ils se parlent sans se parler, se regardent entre chaque bouchée. Peut-être sont-ils des nouveaux amours, des anciens amants, une union de toujours. Elle a une jolie veste noire, brodée de fleurs. Une veste printanière sortie du placard à l’aube de l’automne. Lui dans son gros pull, avec son bouc fraîchement coupé. 

Derrière eux, la fenêtre. Les va-et-vient des passants. Le lundi matin. Le son des tasses de café qui s’entrechoquent en sortant du lave-vaisselle. Le grain moulu, l’odeur de la reprise. Le lundi s’active, la semaine recommence. Le week-end est terminé et avec lui l’euphorie des derniers instants redescend. 

J’écoute ma musique dans mes écouteurs, et je n’ai pas envie de travailler. Il y a tant à vivre, tant à dire, tant à écrire. Je ne veux pas oublier, je veux me souvenir de ces instants qui font du bien. Qu’ils soient autour d’un verre, étendu dans un parc, au bord du canal, sur le canapé. Je veux me souvenir de chaque moment, sans aucune peur de manquer, peur de rater. Simplement, ressentir toutes ces joies et même les peines, les ressentir très fort, les noter dans un carnet, les conserver comme de précieux trésors. 

Pour un jour, peut-être quand moi aussi, j’aurais des taches de vieillesse sur les tempes, un joli chapeau qui masquera ma tête un peu dégarnie, duquel de beaux cheveux blancs viendront habiller mes épaules, je pourrais croquer dans un croissant et raconter à l’homme en face de moi cette vie, ce week-end empli de gratitude. Ou simplement y repenser alors que je partage en silence un cappuccino au milieu de jeunes adultes qui tapent sur le clavier de leur ordinateur un lundi matin. La tête dans la todo list, les cernes d’un week-end festif, le sourire de ceux qui ont à l'esprit les joies passées et la certitude, que ça n’est pas près de s’arrêter

J’ouvrirais mon sac pour en sortir un mouchoir, que je donnerai à cet homme dont le dos se courbe sous le poids d’une vie bien remplie, "tu as une miette au coin des lèvres". Il me sourira. 

À cet instant, cette jolie dame qui en a vu d’autres, sort un papier de son sac à main et un stylo. Peut-être qu’elle aussi, elle commence à lister les beaux moments du week-end, pour ne jamais les oublier. 

Bisous,
Lauréna


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