Lauréna in Loveland

Un voyage à travers les relations et la vie d’adulte.

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Par Lauréna Valette
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Épisode 3 : Tu n’es pas "too much", ce sont les hommes qui ne sont pas assez

Trop sensible, trop bruyante, trop ambitieuse, trop drôle, trop sincère, trop honnête, trop présente sur Internet... Avec "Nobody Wants This", Netflix nous offre une comédie romantique où la vulnérabilité et l'amour se prennent la main, et une scène devenue culte, qui fait du bien à toutes celles qui se sont, un jour, senties "trop".

Si vous avez scrollé ces dernières semaines, lu des magazines féminins, que vous suivez des coachs en relation sur TikTok ou que vous êtes une femme autour de la trentaine, accroc aux comédies romantiques, en quête d’une relation saine et d’une belle histoire d’amour (liste non exhaustive), vous n’avez pas pu passer à côté de la dernière série Netflix, Nobody Wants This. Si vous avez manqué cette nouveauté, je vous offre un rapide résumé : Joanne, qui tient un podcast sur l’amour et la sexualité avec sa sœur, rencontre Noah, un rabbin sexy. Malgré leurs différences, leurs ex et leurs peurs, ils vont tomber amoureux. Netflix nous propose alors une comédie romantique en 10 épisodes, douce et mature, comme un bonbon à savourer sous son plaid, redonnant espoir à toutes celles bercées par des histoires d’amour en 16:9 qui occultaient jusqu’alors la complexité des émotions et des relations humaines.

Avec Nobody Wants This, Netflix soigne les cœurs cabossés des quatre coins du monde. Plus les épisodes défilaient, plus je m’identifiais à Joanne. Elle est perdue, manque de confiance, a vécu des relations difficiles, et redoute que celles qui se passent bien ne soient qu’une illusion. Si je vous recommande chaudement cette série, la venue de mes mots sur votre écran, porte sur une scène en particulier qui m’est restée en tête.

Joanne cherche toutes les excuses pour saboter son histoire avec Noah (tiens, tiens, ça me rappelle quelqu’un). Et puis, Noah la regarde droit dans les yeux, avec assurance et tendresse, et communique cette phrase, ces quelques mots qui pourraient sembler si simples au demeurant.

“I can handle you.” (“Je peux te gérer.”)

Je crois qu’aucun homme ne m’a jamais dit ça. Pourtant, cela aurait tout changé. Annoncer “je peux te gérer”, c’est comme signaler : “Tu peux être toi-même, lâcher prise, tu n’es pas “trop”.”. Combien de fois ai-je été qualifiée de “too much”, “trop intense”, ou pire, de “folle” (comprenez : humaine) ? Je crois que si un jour, un homme m’avait assuré “Je peux te gérer”, mes relations auraient pris une tout autre tournure.

Tu n’es pas trop. Ce sont eux, qui ne sont pas assez.

Un jour, un garçon que je commençais à apprécier m’a dit que c’était “trop”. Je me livrais trop. Je ne laissais pas de place au temps, je me racontais d’une façon, qu’il n’était pas prêt à recevoir. Je m’ouvrais, et c’était trop. Trop tôt, trop intense, trop réel. Depuis, il s’est excusé pour ses mots maladroits, mais l’idée s’était déjà installée dans mon esprit.

Pour mes prochaines dates, je me suis mise en garde : “Lauréna, tu ne raconteras pas tous les détails de ta vie intime. Ce mec que tu ne connais pas, n’a pas besoin de savoir, tes blessures, tes inquiétudes, tes craintes, les abus, les choses que tu dévoiles parce que tu t’ouvres quand tu te sens en confiance, écoutée, sans réellement savoir si la personne en face, est apte à recevoir”.

Pendant plusieurs mois, j’ai cru ça. Que je déballais mes valises sans me demander si la personne en face de moi était en mesure de les recevoir. De voir ce qu’il y avait dedans. Remettant alors, le problème sur moi. J’étais “trop”. Trop réelle, trop vivante, trop féministe, trop ouverte. Je ne savais pas être dans la demi-mesure. Mais soyons honnêtes, je n’ai jamais été une personne, de demi-mesure.

En voyage au Mexique, j’ai rencontré dans une auberge de jeunesse, un mec très sympa. Aux premiers abords, je n’étais pas dans la séduction. Alors j’ai parlé, parlé, parlé. Nous dînions à plusieurs et nous évoquions nos vies sentimentales, le dating, la sexualité. Un soir, une des filles a mentionné un sujet que le politiquement correct qualifierait de “sensible”, et je n’ai pas pu m’en empêcher, les mots sont sortis. Je ne les maîtrisais plus. Comme toujours concernant ce sujet, un flot de paroles presque incontrôlable. J’ai parlé du consentement, j’ai parlé de mon consentement qui n’avait pas été respecté. Une fois. Deux fois. Et les mots étaient dits. J’étais de nouveau trop. J’étais de nouveau moi. J’évoquais les sujets sensibles, les sujets qu’on ne veut pas entendre, les sujets devant lesquels les hommes préfèrent fermer les yeux. Cette nuit-là, avant de me coucher, je me suis sermonnée : “Encore une fois, tu en as trop dit. En plus, il te plaisait ! Génial, tu aurais pu faire un effort, pourquoi tu dois toujours ouvrir tes bagages devant les autres. Devant les hommes.”.

Au réveil, j’ai envoyé balader toutes ces pensées d’un revers de la main. S’il devait se passer quelque chose avec lui, cela aurait lieu, peu importe qu’ils connaissent ou non, les différentes histoires de ma vie. Je n’ai pas des relations parce que j’ai ou non, des bagages, des anecdotes, vécu des moments joyeux comme des moments difficiles. J’ai des relations parce que je suis appréciable.

Tu n’es pas trop. Tu es toi, et je peux gérer cela.

Alors que je réfléchissais à cette thématique, à ce “trop”, je me suis rendu compte que j’avais longtemps intériorisé cela. On apprend aux petites filles qu’elles doivent être discrètes et bien se tenir. Quand les petits garçons, eux, ont le droit d’être foufous, de courir partout et de se faire remarquer. J’ai longtemps été discrète et timide aux yeux du monde, pourtant, une fois la porte de l’inconnu fermée, je ne le suis plus. Autour des gens de confiance, j’ai toujours été grande, bruyante, celle qui rigole fort, qui parle fort, qui, au fil des années, a appris à prendre sa place.

Toutefois, j’y repense et je réalise qu’en couple pendant six ans, je prenais la place d’une souris. Celle qu’on m’a donnée. Être “trop”, cela peut tout représenter : avoir plus d’ambitions que son partenaire, être plus sociable, plus sexy, plus ouverte, plus vivante. Si vous regardez autour de vous, je suis prête à parier que dans les couples qui vous entourent, certaines femmes ne sont pas les mêmes en présence de leur partenaire et sans lui. Elles ne prennent pas la même place : dans leur corps, dans l’espace public, de la tonalité de leur voix à la manière d’être. En couple, j’étais “peu”.

J’ai diminué mes ambitions, mes envies, mes peines et ma personnalité. Pour finalement, me glisser dans l’espace que l’on voulait me donner, ne pas être “trop”, ne pas déborder.

On ne devrait plus avoir peur d’être trop. Je crois que toi, qui me lis, tu ne devrais pas craindre d’être trop. Je crois, j’en suis sûre, que ce sont eux, qui ne sont pas assez. Pas assez intelligent émotionnellement, pas assez bienveillant, pas assez aimant, pas assez mature, pas assez vulnérable, pas assez honnête, pour te gérer. Si toi, tu es capable de gérer les autres tels qu’ils sont, avec leurs instants de folies, leurs craintes, leurs bagages, alors il n’y a aucune raison, que l’on ne puisse pas te gérer.

Une de mes plus vieilles amies est une petite femme anxieuse à l’énergie débordante. Quand elle ne répond pas pendant plus de 7 heures, je sais qu’elle fait la sieste, car son cerveau ne fonctionne pas comme celui des autres. Certaines fois, elle sera la reine de la fête, d’autres fois, elle ne supportera pas la présence des autres. Est-ce que je l’aimerais plus si elle était moins elle-même ? Non. Je l’aime pour les éclats de rire, pour le soutien incommensurable, pour la présence après toutes ces années. Je l’aime avec ses failles et avec ses forces. Et si on est capable de donner ça en amitié, si on est en mesure d’attendre cet amour-là de nos ami.e.s, pourquoi ne pas attendre au moins la même chose, de nos amours ?

Cet été, j’ai rencontré quelqu’un, et sans savoir qu’il allait se passer quoi que ce soit, j’ai été moi. Dans mon entièreté. Avec toutes mes anecdotes les plus rocambolesques, certaines que vous lisez ici, et d’autres que je ne m’autorise même pas à écrire. J’ai raconté des moments drôles, comme des fins d’histoire moins drôles. J’ai été moi, sans filtre, sans crainte, sans peur d’être trop. Juste moi. Et puis, il s’est passé ce qu’il se passe, quand deux adultes qui s’apprécient se retrouvent au bar, autour d’une bière, au milieu de la nuit.

Lorsque quelques semaines plus tard, il a réagi à une histoire qu’il connaissait déjà, j’ai rougi devant mon téléphone. J’ai immédiatement pensé '“j’en avais trop dit sans imaginer ce que l’on allait vivre”. Je lui ai répondu, que j’étais contente que tous mes récits de vie ne l’aient pas fait fuir. Il m’a rassuré, ajoutant qu’il n’aurait pas fui pour si peu. Et j’ai souri.

On ne fuit pas, devant l’entièreté. On n’est pas “trop” quand on est honnête. Et on a le droit d’avoir des belles valises comme des valises remplies de peines et de peurs. On a le droit de les assumer, de vouloir les dévoiler, comme pour montrer cette part de nous que l’on ne veut pas cacher. On n’est jamais trop, quand on est nous-même avec nos beaux et nos mauvais côtés, avec nos belles et nos mauvaises histoires.

Finalement, tu ne seras jamais trop, en étant toi-même.

P.s : voici la seule et unique manière d’embrasser la personne que vous appréciez, à partir d’aujourd’hui (les femmes n’attendront pas moins) (par les femmes, je parle évidemment de moi) (merci pour ta lecture, si tu as aimé, n’oublie pas de partager à tes ami.e.s comme à tes dates et/ou à commenter pour me donner de la force).

Merci pour ta lecture ! J’espère que tu as passé un bon moment.
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